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L’HEURE D’HIVER ISTANBUL
La ville comme espace vécu
Pour la prochaine édition de son festival de film annuel L’heure d’hiver, le Cinema Galeries propose un focus sur la ville d’Istanbul.
Ville cosmopolite / Ville en chantier / Ville fragmentée
Istanbul compte aujourd’hui plus de 15 millions d’habitants, et sa population ne cesse de croître. Capitale économique et culturelle de la Turquie, au croisement des continents européen et asiatique, elle connaît depuis plusieurs décennies une transformation profonde de son paysage urbain. Les bâtiments anciens sont détruits au profit de constructions décrites par les stambouliotes comme « neutres », « uniformes » ou « occidentales ». Si le paysage urbain témoigne de l’histoire de la ville, des différentes époques et influences qui l’ont façonnée, il témoigne aussi de sa réalité actuelle, ou plutôt de ses réalités.
Il y a par ailleurs chez les habitants de la ville le sentiment d’une menace constante d’un tremblement de terre, sentiment ravivé par le récent séisme à Izmir, et auquel ces constructions semblent apporter une réponse. Les habitants qui en ont les moyens cherchent à vivre dans les bâtiments les plus modernes, et plutôt au nord de la ville.
Le cinéma nous emmène de l’espace urbain à l’espace vécu : il montre le tissu de la ville (ce qui fait lien), comment les gens se déplacent, comment ils habitent la ville, comment ils s’approprient les transformations, bref comment ils vivent.
Cette transformation du paysage urbain a des conséquences sociales : expulsion et exclusion de certaines franges de la population, fragmentation urbaine, renforcement des disparités sociales et économiques, gentrification,… Saf, le deuxième long-métrage du cinéaste Ali Vatansever, évoque les conflits naissants entre les habitants démunis du quartier Fikirtepe situé dans la partie asiatique d’Istanbul, chassés par les nouvelles constructions. Le film montre ainsi les implications concrètes et quotidiennes de l’urbanisation de la ville dans l’intimité des habitants, et atteste de la violence de cette urbanisation.
Car cette transformation reflète une transition et une volonté économique et politique : une volonté d’internationalisation, en contraste avec l’image d’un pays gouverné par l’autoritarisme et le nationalisme. L’édition du festival se concentre sur la réalité sociale de la ville d’Istanbul, pour évoquer en creux la réalité et les contradictions du pays, les contradictions qui font la réalité du pays.
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Ville de transit et d’accueil
L’histoire de la Turquie s’aborde aussi par ses flux migratoires, à la fois internes et externes, économiques et politiques. Depuis les premiers déplacements liés à la dislocation de l’empire ottoman et la naissance de la nation turque (entre 1922 et 1924, 1 600 000 grecs sont contraints de quitter l’Anatolie, et 400 000 musulmans grecs sont expulsés vers la Turquie), le pays a connu des mouvements de population importants et divers.
Dans Ah Güzel Istanbul (1962), Atıf Yılmaz évoque les mouvements intérieurs, de l’est à l’ouest du pays, avec le récit d’une jeune campagnarde arrivée à Istanbul pour devenir artiste, et rapidement désorientée par la grandeur de la ville. En racontant la désillusion du personnage, le film traite de l’exode rural dans les années 60.
Aujourd’hui, cette nation frontalière la Syrie et l’Irak accueille sur son sol plus de 4 millions de réfugiés, dont 3, 6 millions de syriens, un « record » dans le monde. Istanbul est aussi une ville de transit et d’accueil, dans laquelle les nouveaux arrivants ont, encore une fois, du mal à se (re)trouver. La jeune réalisatrice turque Ayse Toprak, dans Mr Gay Syria (2017), filme l’histoire de deux réfugiés syriens gays qui, pour cesser d’être invisibles (ou plutôt invisibilisés), tentent de participer à un concours international de beauté gay. Dans une autre veine, le court-métrage autobiographique A year in exile de Malaz Usta, réfugié syrien à Istanbul, documente de manière subjective sa première année d’exil dans la ville, entre nostalgie, exclusion et solitude.
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Programmation
La programmation de cette nouvelle édition s’attache à rendre compte des dynamiques urbaines, démographiques, sociales et politiques qui font la ville, mais aussi et surtout à raconter la manière dont celles-ci sont vécues par les turcs : quelles histoires elles façonnent, quelles expériences et quelles perspectives. Pour cela, la programmation a été composée par des professionnels et artistes turcs, qui témoignent dans leurs choix de leurs vécus et de leurs regards sur la ville.
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Ali Kazma – exposition
Le festival propose également une exposition d’œuvres vidéographiques de l’artiste Ali Kazma. Artiste vivant à Istanbul, Kazma s’intéresse à la manière dont nous transformons les choses autour de nous, et à la manière dont ces choses que nous transformons nous transforment en retour. Son travail est centré sur le temps, les traces du temps, le temps confiné dans certains espaces… Après une rétrospective au Jeu de Paume en 2017-2018, il s’agit de la première exposition d’Ali Kazma en Belgique.
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